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mardi 31 mars 2015

Ukraine: faire du Donbass un ghetto ou un Etat


Comme nous l'avons écrit hier, le processus de réforme constitutionnelle devient le nouvel enjeu du conflit en Ukraine. Dès hier soir, les dirigeants des républiques autonomes de Donetsk et Lugansk se sont prononcés pour reprendre l'initiative et participer pleinement au processus constitutionnel ukrainien. Pour autant, leur demande ne fait pas l'affaire de Kiev, qui se trouve dans une impasse politique.

La réforme constitutionnelle, dont le but avoué dans les accords de Minsk est une sortie de crise négociée avec le Donbass pour mettre fin à la guerre, ne peut se faire sans les représentants de ces républiques. Ce que Kiev refuse, voulant mettre la charrue avant les bœufs: d'abord des élections, ensuite des négociations. Continuant dans le même temps le blocus du Donbass. Bref, soit Kiev refuse la discussion avec le Donbass et fait de ce lieu un nouveau ghetto de Varsovie, en plus grand. Soit Kiev discute et reconnaît par là même les représentants des Républiques.


Hier soir, les représentants des républiques de Donetsk et Lugansk ont repris la main sur la réforme constitutionnelle dont ils sont totalement écartés. Ils ont constitué une commission devant travailler sur la réforme de la Constitution ukrainienne et proposent à Kiev d'envoyer des représentants participer à la commission ukrainienne sur la question. Pour l'instant pas de réponse. Il faut dire que leur précédente proposition de discussion s'est terminée par une fin de non recevoir: vous faites tout d'abord de nouvelles élections selon les règles ukrainiennes entraînant une modification de la composition des organes dirigeants et ensuite nous viendrons vous expliquer la réforme telle que nous la voyons.

Kiev envisageait sinon de discuter avec les anciens élus, Donetsk leur proposa, dans ce cas, de discuter également avec eux de l'échange des prisonniers et du retrait de l'artillerie. Impasse. Mais il est vrai que Kiev se fait représenter par Kutchma dans le groupe de contact, peut être l'Ukraine ne connait-elle plus, depuis son départ de la présidence, de dirigeants légitimes, à force de révolutions colorées ...

Il y a ici un problème formel, mais aussi un problème de fond, qui sont tous deux liés. Formellement, il n'y a qu'un comité spécialisé de la Rada qui s'occupe d'analyser le projet présidentiel et un groupe à l'Administration présidentielle sous la direction du Président. Et rapidement les premiers résultats doivent être présentés fin avril début mai.

Un seul projet, un seul comité, dont sont exclus les représentants des républiques autonomes. Même ce qui reste d'opposition ne peut présenter de projet alternatif. Donc, quand les représentants du Donbass proposent de mettre en place une commission mixte, invitent les parlementaires à venir à Donetsk pour en discuter, il est regrettable de voir la manière dont la proposition, rationnelle, est présentée de manière hystérique dans les médias ukrainiens: "les terroristes du Donbass veulent venir à Kiev modifier la Constitution". Un dialogue est-il seulement possible encore?

Sur le fond, les problèmes sont encore plus importants. Car la divergence est idéologique: les habitants du Donbass se sont levés contre l'idéologie du pouvoir issu du coup d'Etat. Une idéologie ethniquement centrée - l'Ukraine aux ukrainiens - orientée exclusivement vers l'Ouest, rejetant non seulement les contacts avec la Russie mais se fondant sur une réécriture de l'histoire dissociant l'histoire de l'Ukraine de l'histoire de la Russie, pays d'occupation. Constitutionnellement, cela ne peut se traduire que par un Etat hautement centralisé qui doit garder la main sur les différentes régions pour aplanir la diversité culturelle et ethnique du pays. En d'autres termes, il ne peut être question de décentralisation, encore moins de fédéralisation à l'américaine, le centre a trop peur de cette diversité qui en découle naturellement.

Or, les habitants du Donbass réclament dès le début de leur soulèvement ce droit à la différence, ce droit à vivre en liberté et en paix au sein d'une Ukraine multiculturelle, comme elle l'était avant le putsch. D'où la revendication d'une plus grande autonomie locale, mais dans le cadre de l'Etat ukrainien, à la condition expresse qu'il reconnaisse ce droit. Ce qui est inacceptable pour Kiev. Suite à quoi s'est développé le séparatisme.

Et Poroshenko s'est déjà prononcé sur la question de la teneur de la réforme: il n'y aura pas de changement idéologique et pas de réforme en profondeur, juste quelques retouches. Donc il ne peut y avoir de réforme constitutionnelle concertée qui permette de mettre fin à la guerre. Sauf à considérer comme acceptable une solution inacceptable: la solution finale. A savoir transformer le Donbass en ghetto de Varsovie, affamer les populations. Ce qui est déjà en cours quand toutes relations ont été coupées: bus, gaz, électricité, médicaments, nourritures, paiement des pensions, arrêt des banques, etc. C'est bien la solution qui a été choisie. Mais comment parler d'une quelconque réforme constitutionnelle dans ce contexte? C'est moralement inacceptable et juridiquement infondé. On ne peut fonder une Constitution sur la négation d'une partie de sa population.

L'intérêt du Donbass, dans ce contexte, est évidemment de renforcer ses structures étatiques. Normaliser les forces armés, ce qui est presque le cas. Payer les pensions, qui le seront en rouble à partir d'avril. Faire fonctionner une justice et une police, c'est en cours, mais encore difficile. Restaurer les bâtiments, reconstruire, garantir  les services publics: la poste fonctionne à nouveau. Et tout cela sous une activité militaire faible mais continue. Car s'il n'y a plus de grosses opérations des forces armées ukrainiennes, celles-ci continuent à violer le cesser-le-feu tous les jours. 

Il reste encore beaucoup à faire, notamment la réunion des deux républiques en une seule structure, plus concentrée et plus efficace que ne l'est pour l'instant Novorossia. Car dans ce cas, soit les négociations avec Kiev finissent par aboutir et le "prix" en sera plus élevé (il y aura plus d'éléments pour négocier), d'autant plus qu'un tiers du PIB ukrainien est concentré dans les républiques de Donetsk et Lugansk, soit les négociations échouent et le territoire pourra plus facilement s'administrer et construire son autonomie.

1 commentaire:

  1. Novorossia doit devenir une composante de la Fédération de Russie , point barre . Et "Novorossia" , ça veut dire les terres jusqu'au Dniepr et jusqu'à Odessa . Oui , il s'agit de reconstruire l'Empire des tsars , n'en déplaise à Juppé ...Condition première de l'unité du continent .

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